Le temps d’après

Le temps d’après… Quinze ans après Dans la Forêt … Huit ans après ma lecture de ce roman qui restera à jamais gravé en moi… Après avoir pensé de très nombreuses fois à Nell et à Eva et à ce qu’il aurait pu leur arriver…

Le temps d’après… Elles ne sont plus deux… Le bébé a grandi, Burl est là avec ses mamans « noustrois » comme il le dit si bien. Eux trois, oui, mais pas seulement, il y a la Forêt, les inhalants et les exhalants, toujours au cœur de l’histoire… La Forêt, tellement importante pour Jean Hegland, elle qui a eu la chance d’y vivre.

Cette lecture, je ne m’y attendais pas. Une suite, nous sommes nombreux à ne plus l’avoir attendue. Pourtant, une fois dans mes mains, une fois les premières pages lues et tournées, je me suis retrouvé à nouveau dans la Forêt. Avec une toute nouvelle vision, voir et appréhender le monde d’après à travers les yeux de Burl. Lui, le monde d’avant, il ne l’a pas connu… Il y a seulement ses mamans, les personnages des histoires qu’elles lui racontent, la Forêt, ses pensées et ses désirs…

Nell, Eva, Burl euxtrois, ils ont appris de la Nature et de la Forêt, ils ont appris à régresser pour progresser… Ils ont appris la suffisance et le respect… Ils ont créé leur propre langage… D’abord perturbant, cette langue m’a profondément touché.

Cette suite, comme beaucoup, je me l’étais imaginée, et même si Jean Hegland a réussi une nouvelle fois à me transporter dans son univers, je dois dire que je ne suis pas convaincu par la fin, elle m’a même un peu déçu. Bon il y aura une suite qui va certainement donner des explications et peut-être me donner tord. En attendant, je vais garder en mémoire les histoires au coin du feu, les nuits à regarder les étoiles et les diverses cueillettes.

J’écoutais le Grand Tout, et le Grand Tout m’écoutait à son tour.
J’écoutais mes mères, aussi, leurs voix comme une autre sorte de rivière, leurs mots qui m’enveloppaient tout entier dans leur sortilèges sonores et me nourrissaient de leur fascinantes significations. Mes mères m’ont appris tellement de mots – des verbes pour saisir l’action, des noms pour la figer en actes distincts. Sans compter les mots qu’on a créés après, quand ceux que mes mères avaient apportés avec elles du monde d’Avant n’étaient pas assez complets ou justes pour dire tout ce qui était nouveau dans le monde de ce nouveau présent.

Je savais que j’étais arborescent avant de savoir que j’étais un garçon parce que les arbres étaient mes premiers amis, mes meilleurs compagnons et mes jouets préférés. Les arbres me donnaient de quoi manger et de la lumière et de la chaleur et de l’ombre. Ils me donnaient des bâtons pour piquer, des fruits à coque pour me nourrir, des branches pour construire, ils me donnaient des brindilles et des feuilles et des fleurs et des galles pour que je fabrique mes créatures. Les arbres me chantaient des chansons, m’organisaient des spectacles tachetés de lumière pour que je joue et que j’y entre en rêve pendant que mes mères travaillaient.
Quand j’apprenais à marcher, ils m’ont prêté leurs troncs qui étaient tombés pour que je m’appuie sur eux. Et une fois que j’ai su, je me suis servi de ces mêmes arbres pour danser le long de leurs troncs, mes bras tendus comme des ailes afin de me rattraper si je valsillais.

J’ai appris à écouter avant d’apprendre à parler. Avant même de savoir marcher à quatre pattes, j’écoutais quand j’étais couché. 

Lecture terminée le 2 février 2025


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